brasseries alsaciennes bio

Les brasseries artisanales alsaciennes qui font la part belle au bio et au local

Les brasseries artisanales alsaciennes qui font la part belle au bio et au local

Comme aurait très bien pu le scander un marketeux officiant dans le domaine du T-shirt à slogan : “Le bio c’est plus qu’un concept, c’est un état d’esprit”. Et en même temps c’est loin d’être faux, il faut bien l’avouer. Échaudé sur le thème du “healthy” lors de la rédaction de la critique de la bière sans gluten signée Sainte-Cru, mon cervelet malade a cru bon de dresser un petit état des lieux des brasseries alsaciennes bio qui ont décidé d’œuvrer pour les nobles causes de l’éthique, du local, ou des deux en même temps. Et figurez-vous qu’elles sont pas mal nombreuses à s’y être collées dans notre beau coin de France. Raison de plus pour en parler sur nos pages dématérialisées et ainsi combler les attentes des adeptes du mantra “make earth great again” cher à notre modeste Roi Président.

No mutants allowed

Comme tout ce qui est affublé d’un logo censé faire preuve d’un respect immaculé de procédures strictes, les bières bio sont soumises à un cahier des charges avec lequel il ne faut pas badiner.

Pour faire simple, les brasseurs doivent respecter les points suivants s’ils tiennent à pouvoir affubler leurs étiquettes du tant désiré logo AB :

  • Utiliser des malts et houblons certifiés bio,
  • Utiliser de l’eau potable (sisi),
  • Utiliser des levures ni ionisées, ni modifiées génétiquement,
  • Utiliser du sucre bio (en cas d’utilisation pour la refermentation).

Logo certification agriculture biologique

Une fois ces conditions réunies, ils doivent faire appel à un organisme de certification (comme Ecocert, Certipaq Bio ou Qualisud) afin de valider l’appellation “bière bio”, le tout en échange d’un chèque dont le montant n’est pas tout à fait négligeable selon la taille de la brasserie artisanale (environ 700€ par an pour 10 recettes). Bien entendu, des suivis réguliers sont nécessaires et des contrôles inopinés peuvent être réalisés afin de scruter la bonne tenue des procédures par les brasseries.

Si ces démarches sont relativement faciles à mettre en place, il faut tout de même savoir que toutes les sortes de malts et toutes les variétés de houblons n’existent pas forcément en bio. Et quand c’est le cas, il peut également se poser le délicat soucis des quantités disponibles. Pour couronner le tout, les prix pratiqués en bio font rapidement grimper la facture en flèche. C’est tout du moins le cas pour les houblons tandis que l’écart est relativement marginal en ce qui concerne les malts. C’est d’ailleurs pour cette raison que certaines brasseries utilisent des malts bios, mais des houblons “conventionnels”. L’effort est déjà louable, mais pas suffisant pour obtenir le fameux Graal AB.

De manière générale, il se dit aussi qu’il est tout à fait possible d’atteindre le statut de produit bio à condition que le total des ingrédients non-bio (mais susceptibles d’être labellisés) ne dépasse pas 5%. Cette petite astuce permet par exemple de négocier des dérogations pour tel ou tel malt/houblon qui ne serait pas bio pour cause de non-disponibilité.

Du coup oui, il existe de légères incohérences et autres légèretés avec la bannière AB. Afin de combler les plus tatillons, il existe également les labels Nature & Progrès ou encore Démeter qui poussent quant à eux le bouchon plus loin que Maurice. Le premier impose des exigences supplémentaires sur les composés de l’eau, les levures, les produits nettoyants utilisés, la récupération des drêches et de l’eau usée, etc., alors que le second fait la part belle à la biodynamie. Enfin ça c’est pour la théorie car il semblerait qu’en pratique certaines “optimisations” soient tolérées afin de les obtenir. Bref…

logos nature & progrès, et déméter

Du fait de leurs contraintes respectives et des coûts que cela peut engendrer, il n’est pas aisé pour une brasserie artisanale de les obtenir. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’il y en a qu’une trentaine en France (sur plus de 1200) qui peuvent se targuer d’être sous le giron de Nature & Progrès.

[Un gros poutou aux membres du forum de Brassage Amateur qui m’ont permis d’égayer ce paragraphe à l’insu de leur plein gré]

Le local, c’est juste à côté

Comme le diraient les puristes s’ils avaient accès à la partie administration du site pour écrire la phrase suivante : “à quoi bon mettre en avant la carte du bio si de l’autre côté on fait venir des ingrédients de l’autre bout du monde qui nécessitent de cramer des tonnes de mazoute ?”

La logique voudrait donc que les brasseries françaises produisant des bières labellisées AB se contentent d’utiliser (notamment) des houblons ayant poussés dans le pays. Et ce qui tombe ma foi fort bien pour nous, c’est que l’Alsace est le plus gros producteur français de ce fameux or vert. Encore mieux, la recherche variétale mise en place depuis 2001 par le Comptoir Agricole a permis d’accoucher de nouvelles variétés de houblons aromatiques plutôt réussies qui arrivent tout doucement à titiller les gros cadors du genre habituellement produits aux États-Unis ou en Nouvelle-Zélande.

Logo Hop France

Ouaip, c’est cool, mais la France a encore bien du retard et certains profils aromatiques du feu de dieu demeurent toujours aux abonnés absents dans nos contrées (coucou Citra, coucou Nelson Sauvin). Les brasseurs peuvent ainsi trouver dommageable de se priver de telles ou telles notes gustatives pour leurs breuvages. Ceux-ci utiliseront donc malgré tout les houblons désirés provenant de contrées lointaines, mais en gamme bio bien entendu.

Pour la petite histoire, sachez que chaque variété de houblon est soumise à un brevet. Ce qui fait que non, on ne peut pas faire pousser n’importe quoi n’importe où. Comme tout brevet, le délai de prescription est de 25 ans et il faut donc s’armer de patience pour avoir droit à des versions locales des houblons superstars. Il est par exemple désormais possible de trouver du Cascade alsacien, belge, allemand ou même chinois… mais tout le monde s’accorde à dire que l’originel américain demeure malgré tout bien plus efficace.

Bref vous l’aurez compris, les brasseurs alsaciens ont potentiellement tout ce qu’il faut sous le coude pour brasser du bio et du local de qualité… à condition que les stocks le permettent, ce qui n’est hélas pas toujours le cas comme ont pu nous l’avouer plusieurs brasseries alsaciennes bio que nous avons contacté sur le sujet. Les houblonnières ont un coût d’installation très important, le houblon est une plante grimpante très fragile face aux intempéries, aux maladies et aux parasites, et la demande ne cesse d’exploser avec l’impressionnante multiplication des nouvelles brasseries artisanales qui bourgeonnent dans le pays ces dernières années. Ça, c’est pour le houblon conventionnel alors imaginez le bordel que c’est pour les houblons bio qui ne représentent qu’une faible proportion de la production…

Mais pas de panique, si pénurie il y a, c’est vers les pays limitrophes tels que l’Allemagne ou la Suisse que les adeptes du houblon bio de proximité se tournent. Voilà qui limite le saccage de leur éthique.

Les brasseries artisanales bio/locales alsaciennes sont vos amies

Trêve de blablatage, voici une liste théoriquement à peu près exhaustive des brasseries artisanales de notre belle région qui versent dans le bio et/ou le local.

Bas-Rhin

Brasserie BAT

Brasseuse de Bat dans un champ de houblon
© Brasserie BAT

Pas de lézard chez BAT, l’intégralité des bières sont bio, la brasserie a été adoubée Nature & Progrès en octobre 2017, de l’eau de source proche de la brasserie est utilisée, les plantes mises à contribution dans certaines recettes sont issues de leurs propres cueillettes, etc. Les houblons sont alsaciens autant que possible, mais comme nous le raconte Elisabeth, l’une des 2 brasseuses et fondatrices de la brasserie : “la demande en houblon bio a pris une telle ampleur ces derniers temps que la production alsacienne ne parvient pas à nous fournir en totalité. Nous avons été malheureusement contraintes cette année d’aller en chercher ailleurs.”

Petite précision : je n’ai pas contacté toutes les brasseries évoquées dans cet article, mais sachez que ce cas de figure n’est clairement pas exclusif à BAT. Le fait de stipuler que les houblons utilisés sont à 100% bio l’est assurément, mais alsaciens c’est déjà plus compliqué…

Brasserie Blessing

Pas de chichi chez Blessing, absolument toutes leurs bières sont certifiées bio par l’organisme Ecocert, et les malts et houblons proviennent tous d’Alsace. Blessing est également la bonne preuve que ces pseudos-contraintes ne sont aucunement des freins à la qualité ou à la reconnaissance puisqu’ils accumulent déjà les médailles lors des divers concours du Salon de l’Agriculture à Paris. La dernière en date a d’ailleurs été fraîchement cueillie il y a quelques jours par leur IPA baptisée “La Filoute”. Bim.

Gamme de bière de la brasserie blessing
© Brasserie Blessing

Brasserie La Mercière

Ici tout est bio et les houblons utilisés sont exclusivement alsaciens. C’est déjà bien, mais le plus gros est à venir puisque le couple prévoit de produire son propre malt et ses propres houblons aux abords de la brasserie. Un projet sacrément ambitieux s’il en est, et nous leur souhaitons bien du courage pour y parvenir.

Brasserie La Mercière

Brasserie La Narcose

Toutes les bières portent le macaron AB, la brasserie est certifiée par l’organisme Nature & Progrès, et le couple fait déjà pousser quelques plants de houblon dans son jardin. Des essais restent encore toutefois à réaliser afin de savoir s’il est possible de les utiliser dans leurs bières, ou s’il vaut mieux se contenter d’une application ornementale…

Carte de visitie de la brasserie la narcose
© Brasserie La Narcose

Brasserie Perle

Si la Brasserie Perle n’est pas du genre à taper dans le bio pour l’ensemble de sa gamme, elle s’est tout de même décarcassée à pondre une bière dédiée parfaitement certifiée AB : la Perle Nature. Et tant qu’à faire, figurez-vous que tous ses ingrédients sont alsaciens dites donc.

Etiquette de bière Perle Nature

 Brasserie Uberach

Tout n’est pas bio chez Uberach, mais la panoplie a le mérite d’être vaste avec des dérivées certifiées AB parmi les classiques de la maison (blonde, blanche et ambrée) et les spéciales (Noël, miel et brune). Tous les houblons utilisés viennent du coin.

Brasserie Uberach

Haut-Rhin

Brasserie G’Sundgo

Toutes les bières sont certifiées bio, et tous les houblons sont alsaciens. Ou presque. En effet, là aussi Gilles, brasseur et fondateur, s’est prêté au jeu des confidences en avouant qu’en cas de pénurie il est obligé d’aller voir ailleurs. “Mais depuis l’année dernière j’ai un contrat pour de l’alsacien, du coup ce sera beaucoup plus facile”.

Brasserie G'Sundgo

Un contrat ? Pour quoi faire ? Comment ça marche ?

Eh bien la manœuvre consiste tout simplement à s’engager à prendre un certain volume (généralement plutôt important) de houblon à l’année afin de s’assurer de ne pas tomber en rade. Un bon plan, certes, mais à condition d’avoir les finances suffisantes, et d’être en capacité de tout écouler.

Brasserie S’Humpaloch

  • Adresse : 21 A Rue de la Vallée, 68610 Lautenbach

Probablement l’aîné de la bière bio en Alsace, Jean-Jacques est accessoirement le mentor de Gilles de la brasserie G’Sungo. De ce fait il coule de source que toutes ses bières sont également bio.

Brasserie des Quatre Pays

Non le bio ne fait pas peur aux p’tits nouveaux, et ce n’est pas La Brasserie des Quatre Pays qui dira le contraire. Ici, l’intégralité des bières brassées par Fabien sont certifiées bio, mais avec des houblons provenant d’horizons divers et variés.

Brasserie des Quatre Pays
© Brasserie des Quatre Pays

Ça m’a donné soif tout ça

Si cet article et notre analyse du marché des brasseries alsaciennes bio vous a mis l’eau (ou plutôt la bière) à la bouche, notez que pour vous procurer les bières de tout ce petit monde, le plus simple reste encore de leur rendre visite. Les brasseries sont généralement ouvertes le samedi afin de faire de la vente sur place. Sinon vous avez bien entendu les caves à bières, caves à vins, boutiques bio et tout le tralala. Dans ce domaine, les habitués du milieu se feront un plaisir de vous accueillir :

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